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1 juin 2008 7 01 /06 /juin /2008 14:15
Cadouin
 
 
 
L'acte de fondation de l'abbaye apporte un certain nombre de points importants qui paraissent avoir été ignorés jusqu'à ce jour, du moins en ce qui concerne l'étymologie du nom Cadouin.
C'est l'acte le plus ancien. Il date de 1115, et il est extrait du Grand Cartulaire de L'abbaye de Cadouin . Document qui regroupe toutes les donations des seigneurs du Périgord à Robert d'Arbrissel.  Ce dernier ne conservera pas ces biens. Il les abandonne au profit de Géraud de Salles sur le consentement de Pétronille de Chemillé abbesse de Fontevrault. Suite à cette donation, Géraud de Salles entreprendra la construction de l'abbaye de Cadouin. 
Dans cet acte, il s'avère que le nom Cadouin désignait en premier lieu la forêt, sylva Cadunensis (la forêt du pays de Cadouin, le suffixe -ensis, indique le pays, la région). Ce n'était donc pas un lieu précis, mais une zone boisée dans laquelle se situait un vallon appelé Val Seguin, et dans celui-ci un lieu appelé Bassa Calderia. C'est précisément à cet endroit que va être élevée l'abbaye qui ne portera pas le nom de Basse Caudière ni celui de Val Seguin, mais celui de la forêt : Abbatia S. Mariae de Cadunio (acte de 1201). Cette zone forestière était en fait une partie de la Bessède .
 
Albert Dauzat , suivant la méthode de d'Arbois de Jubainville, considère que c'est le nom d'homme gallo-roman "Catonius" qui est à la base du nom Cadouin. En contrepartie pour un lieu du département du Gard appelé La Cadière, il estime que ce nom est : formé sur le Provençal "cade", genevrier, avec le suffixe - iera (du latin - aria) désignant un endroit où poussent les genévriers et appelé cade en Provençal (du latin catanus). Il rapporte aussi à la racine catanus, Cadenet village du Luberon, Cadaneto et Cadeneto à la fin du Xe siècle, formé selon lui à partir du radical cadene et du suffixe collectif etum. D'autres parts, les lieux Cadenasso, sont des landes de genévriers, en Aveyron et Languedoc, comme l'est Cadière en Languedoc et en Provence, ajoutons-y Cade qui désigne le grand genévriers en Provençal.
Les genièvres apprécient les lieux arides, rocailleux, les sols calcaires, et sont fréquemment associée au chêne vert, kermès et pubescent. La topographie des lieux environnants Cadouin, la nature des terrains (calcaire et molasse) et les essences qui poussent sur les plateaux entourant la ville, correspondent assez bien à cette description. Le chêne pubescent domine et avec lui les genévriers.
Nous retrouvons dans tous ces éléments des ressemblances éloquentes avec les détails donnés par l'acte de donation à Robert d'Arbrissel. Aussi, il semble logique de rechercher l'étymologie de Cadouin à partir de catanus > cadene, genevrier, dont les dérivés Cadeneda, cadenièira, cadenassa, et surtout cadière, désignent des lieux couverts de genièvres.
Le genevrier cade (juniperus ocycedrus) (4) , n'est pas l'espèce la plus répandue en Périgord. Cet arbuste qui a des baies marrons, pousse surtout dans les pays méditerranéens. Cependant, même si cette espèce est peu abondante, elle a quand même été localisée en Périgord où arbres et arbrisseaux de type méditerranéens ne sont pas absents. Ceci explique pourquoi le nom La Genèbre désignant le genièvre commun (Juniperus communis, les baies sont bleus violettes) est le nom le plus fréquent rencontré en toponymie. C'est l'espèce la plus fréquente.
Mais il y a peut-être une autre explication.
Le mot catanus d'où vient cade n'est attesté qu'une seule fois dans un glossaire du VIIe siècle. Et ce n'est qu'au XIIIe siècle qu'il apparaît dans un texte occitan. Certains étymologistes lui donne une origine pré-celtique à cause de son aire géographique qui n'est que gallo-romane et le fait qui ne soit pas présent dans aucune des langues celtiques insulaires. Ce mot qui n'est pas un substantif purement latin est donc très ancien, et il semble bien qu'à l'origine il désignait toutes les sortes de genièvre.
Il est maintenant assez clair, que catanus>cadene, avec le suffixe -ensis, d'où la Sylva cadenensis, ou cadunensis, indiquait un lieu ou pousse le genièvre.
Le relevé des graphies anciennes fait apparaître que le nom Cadunum a évolué vers la forme Cadoynum au XVe, puis Cadoing, mais seulement au XVIIIe.
La prononciation occitane locale Codougn très proche de coudoun, coing, a amené une certaine confusion étymologique. D'où le choix de la ville qui a composé ses armoiries avec un cognassier accosté de deux fleurs de lys. Les forêts de cognassiers ne sont pourtant pas légions, d'autant plus que cet arbuste est originaire du Caucase et d'Iran, et qu'il n'apparaît pas en France avant le XIIIe siècle. Comment aurait-il pu donner son nom à une forêt avant le XIIe siècle? Cette étymologie est donc a effacer des mémoires définitivement.
Conclusion.
C'est sur la base de cadenum, qu'à probablement était formé le nom Cadouin, cad(en)um > cadum, puis Sylva Cadumnensis (forêt de genévriers), nom qui définissait la particularité de la zone, et notamment les versant et les hauteurs entourant le Val Seguin. Le lieu Basse Caudière, où sera bâtie l'abbaye est un argument de plus en faveur de cette étymologie.
Pour finir, le relevé des noms de lieux-dits entourant Cadouin est très significatif : Le Grand Bost, Les Grands Picadis (les grands taillis), Forêt de la Peyre, La Bessoulade, (bosquet de jeunes bouleaux) Les Bouygues (terre défrichée, déboisée), Les Grandes Garennes (futaie où le gibier abonde, notamment le lapin), La Bruguette (bruyère), Les Brandes (lande, bruyère) La Rameyre (rameau), Le Randal (haie, buisson). Tous ces lieux sont inclus dans La Bessède.
Le premier bénéficiare de ce lieu, Robert d'Arbrissel, portait un nom qui le prédestinait à vivre dans la forêt et à y fonder des établissements religieux ( arbrissel ou arbricel = arbrisseau). Il a d'ailleurs contribué au défrichement des forêts d'Anjou et de Bretagne. En 1094, il avait fait bâtir un monastère dans la forêt de Craon (Vienne), Sancta Maria de Bosco.
Pour sa part, Géraud de Salles, fondateur de Cadouin, qui a récolté de Robert d'Arbrissel toutes les donations des seigneurs locaux,  a aussi fondé l'abbaye de Grandselve "Grandis silva", (Tarn-et-Garonne) = grande forêt.
Il est évident que tous ces noms qui ont un lien commun avec la forêt s'explique par le fait que monastères et abbayes ont été implantés dans des endroits reculés, déserts, et fortement boisés, lieux de prédilection pour le cénobitisme. Cadouin n'échappe pas à cette règle. Abandonnont donc la forêt de cognassier pour un lieu où pousse le genièvre. 


C.B


 
Le lieu de Basse Caudière, où est bâtie l'abbaye de Cadouin
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